
“TOGETHER WE REACH THE GOAL" *
A vos crampons, prêts, partez...
Pour clôturer la saison, l’envie de me rendre à la Saintexpress (petite sœur de la Saintélyon) m’a quelque peu chatouillé, d’autant que LAFUMA est partenaire officiel de cette manifestation sportive de grande renommée.
Au programme, 42 km sur les monts du lyonnais dans un froid sibérien et une neige fraîchement tombée 3-4 jours avant.
Samedi 1er décembre 2012 en fin d’après-midi : nous sommes bercés, mon frère et moi, par la musique qui retentit dans le stade de Gerland où nous venons de récupérer nos dossards. Entre les Rolling Stones et U2 nous tentons de nous assoupir ou tout du moins nous décontracter du trajet en attendant 21 heures avant de prendre les navettes pour Sainte Catherine (point de départ de la course à 23h).
Je me suis préparé méticuleusement pour être sûr de pouvoir affronter le froid sans trop de difficulté et je teste cet équipement en me dirigeant vers les bus affrétés par l’organisation. J’ai pris soin également, comme me l’a conseillé ma chère cousine, de me frictionner les mollets avec des gousses d’ail afin de conjurer cette poisse qui me colle sur cette saison (Rires !!!!!).
Pas moins de 30 machines ronronnantes se remplissent une à une des nombreux trailers qui s’agitent dans tous les sens pour grimper et se mettre rapidement au chaud derrière les vitres embuées.
Nous nous stoppons devant l’une d’elles (pourquoi celle-ci, je ne sais pas ! le destin sûrement) et nous nous installons religieusement, suivis de soixante autres mordus, sous le regard patriarcal du conducteur. Il est 21h15 lorsque les cars s’élancent en fil indienne pour 45 minutes de voyage.Certains dorment, d’autres préfèrent immortaliser l’instant par un cliché tandis que leurs voisins écoutent de la musique. Moi, je contemple le paysage à travers la vitre tout en me concentrant sur ma course, lorsque je remarque que la farandole de bus quitte l’autoroute : Tous, sauf nous ! Beuh, pas clair tout ça me dis-je !
Chacun y va de son commentaire plus ou moins rassurant en voyant les panneaux indiquant St Etienne et je tente de trouver une raison rationnelle au fait que nous sommes les seuls sur cette foutue route. Plusieurs minutes passent à tergiverser, puis je me rapproche du chauffeur afin qu’il m’explique pourquoi les autres bus ont pris un itinéraire différent du nôtre et il me répond qu’ils ont dû se tromper.
Pas plus rassuré que cela, je me rassieds sur mon siège et regarde les minutes qui s’égrainent sur l’affichage digital du tableau de bord. Mes yeux, fixés sur l’heure, sont détournés par une flèche clignotante qui m’indique que nous tournons. Nous allons enfin quitter l’autoroute et cheminer sur une petite voie sinueuse où il est quasi impossible de croiser une voiture sans manœuvrer.
22h15, le chauffeur est hésitant à l’entrée d’un village car l’étroitesse de la rue ne laisse pas droit à l’erreur, et c’est certainement à ce moment là que nous réalisons ou plutôt que nous avons la confirmation que c’est lui qui s’est trompé. Nous sommes à 9 km de Sainte Catherine, nous progressons lentement avec une neige qui a fait son apparition sur le bord des fossés.
Dans la nuit sombre se dressent au loin, face à nous, deux phares d’un blanc brillant. Il s’agit d’un car, un gros car que nous allons devoir croiser sur route coincée entre le flanc de la colline et la rambarde de sécurité. La manœuvre est audacieuse, minutieuse et prend quelques minutes de plus de ce temps précieux qui s’écoule inexorablement.
22h30, nous avançons encore un peu jusqu’à 3 km de notre point de chute, mais malheureusement ce car que nous venons de passer en appelle un autre, puis un autre et encore un, bref ! L’ensemble des bus qui sont parti en même temps que nous de Lyon et qui redescendent eux par cette route, que nous tentons, au contraire, de remonter.
La situation, pour le moins cocasse, prête à sourire, mais laisse vite place à une montée de stress pas très favorable à un départ de trail de 42 km. Des coureurs envisagent même de descendre pour rallier le départ avant de se raviser. Nous sommes à un quart d’heure du coup d’envoi et nous croisons les doigts dans l’espoir que le dernier car qui vient de nous croiser et bel et bien le dernier.
C’est le cas ! Après 28 bus nous repartons enfin et arrivons à sainte Catherine à 22h53. Nous sautons du bus d’un même élan et au pas de course nous nous dirigeons vers le stade d’où l’on distingue l’arche. Au passage, je jette mon sac de rechange et me faufile jusqu’à la ligne au milieu des 2500 coureurs déjà massés. Le speaker annonce le départ dans 3 minutes, le souffle est haletant, mon cœur frappe dans ma poitrine et j’ai les jambes coupées. Je regarde mon frère, lui fait un signe d’encouragement et je me dis « fichue scoumoune ».
5, 4, 3, 2,1 et c’est parti à travers les rues de Ste Catherine. Nous retrouvons très rapidement une piste enneigée où l’on peu apprécier l’accroche de nos chaussures. Parfois, la lune se reflète sur le sol et laisse entrevoir une portion verglacée où seules des prouesses d’équilibriste peuvent nous maintenir debout.
Heureusement, je passe sans trop de mal les premiers hectomètres et me positionne à la quinzième place derrière un groupe de tête partit à un rythme effréné. Dès la première montée, je sens que mon influx nerveux est resté dans le bus et c’est avec les jambes lourdes que j’essaie de maintenir ma position.
Sur les parties roulantes, je me refais une santé et m’accroche à un petit groupe dont le tempo semble me convenir. Dans les portions en sous bois, la vigilance est de mise surtout avec les yeux larmoyants à cause du froid et les feuilles agglutinées qui camouflent les multiples pierres au sol.
19 km, j’arrive au premier ravitaillement à la 11ème place. Mon équipement LAFUMA me convient parfaitement, ni besoin d’en rajouter, ni besoin d’en enlever. Ce serait plus au niveau du ventre que je ressens une gêne et j’éprouve beaucoup de difficulté à m’alimenter d’autant que ma boisson dans le bidon est glacée et me tortille les boyaux à chaque gorgée.
Les sensations reviennent peu à peu sur la deuxième partie bien moins enneigée mais beaucoup plus boueuse pour le coup. Je prends plaisir à évoluer dans l’obscurité, la frontale fixée sur la tête, tout en remontant quelques concurrents.
J’aperçois une lumière avant la descente du château et décide de m’en rapprocher. Une fois à sa hauteur, j’encourage ce trailer mais il semble épuisé. Je poursuis alors à nouveau seul dans ce monotrace devenu un véritable champ de mines où il faut assurer ses appuis pour ne pas tomber.
Malheureusement, mon pied accroche une branche et me fait plonger dans la boue fraîche et collante. Je me remets aussitôt à courir et ressens une lourdeur dans la cuisse. Le choc avec le sol sur un muscle en action me fait réaliser que ce n’est pas agréable du tout.
32 km, deuxième point de contrôle, je suis 8ème et je ne m’arrête toujours pas au ravitaillement car de toute manière je ne peux rien avaler.
La montée sur route après le garage est mythique tant la pente est raide. Je m’efforce de courir pour maintenir en mouvement le muscle meurtri de ma jambe et je reviens sur un coureur qui peine à mettre un pied devant l’autre sur cette partie bitumée.
Les 9 derniers kilomètres restent une course sur route avec une première moitié au profil descendant et pourtant je ressens beaucoup de mal à relancer, comme si les batteries étaient sèches. Je serre les dents jusqu’au bord de la Saône puis du Rhône ; cette partie est interminable quand on a plus de jus et je sais qu’il va m’être difficile de maintenir cette 7ème place si je ne suis pas capable de courir à plus de 12km/h.
4 km de l’arrivée et je vois revenir un duo bien lancé, qui s’auto-motive et qui m’est difficile d’accrocher. Puis suivront deux autres concurrents accompagnés chacun d’un suiveur à vélo et dont je suis la carotte. Point de rage en moi, mais juste un peu d’amertume de ne pas pouvoir rivaliser et relancer la machine pour les empêcher de me reléguer à la 11ème position avant de franchir la ligne en 3h40mn.
Mon frère Jérôme clôturera cette course à la 160ème position en 4h40 environ.
A bientôt sur les sentiers…
Sébastien


TRAIL : EXTREME SPORT
BY SEBASTIEN FARANO