
“TOGETHER WE REACH THE GOAL" *
Nuit blanche pour des "illuminés"
Lyon, le 4 décembre 2010, près du stade Gerland…
22 heures et 18 minutes, c’est ce que nous indique l’horloge près du chauffeur de bus. Mon frère est à mes côté dans ce car embué, cherchant en vain le sommeil sous les lumières agressives du plafonnier et les soubresauts de la machine dans chacun des virages. Nous sommes dans l’une des nombreuses navettes prévues par les organisateurs en direction de Ste Catherine où est donné le départ de cette première édition de la Saint Express 2010.
A notre arrivée, le paysage est fidèle aux prévisions, les champs sont recouverts d’un épais manteau neigeux et la température largement en dessous de zéro nous laissent présager à un millésime d’exception. Nous nous hâtons sous un des chapiteaux pour finir de nous équiper à l’abri de ce froid sibérien accompagnés de quelques centaines de trailers. La condensation gèle instantanément au contact de la bâche protectrice au dessus de nos têtes, me faisant hésiter sur l’équipement à adopter. Après plusieurs tergiversations, je me décide de cumuler trois couches différentes, misant d’avantage sur la sécurité d’être au chaud plutôt que dans la crainte de transpirer. Mon frère fait de même et nous partons vers l’arche de départ où se masse 2000 « illuminés » du samedi soir, avec leur frontales au front et une gestuelle énigmatique. Chacun y va de sa formule, certains sautillent sur place tandis que d’autres secouent les bras par spasmes, mais pour être sincère, nous attendons avec impatience le coup d’envoi pour enfin nous réchauffer.
Minuit, le chrono est calé sur celui de la Saintélyon, le speaker met l’ambiance et démarre le compte à rebours, 5.4.3.2.1… Une petite tape amicale sur la hanche de mon frère, et c’est parti pour 45 kilomètres d’un pur trail blanc en nocturne, sous les encouragements des spectateurs et des relayeurs.
Afin de dégrossir le peloton, nous effectuons une petite boucle de 4 kilomètres sur les hauteurs de Ste Catherine. Un démarrage en côte, et à froid si je puis dire, permet rapidement de tester l’état de forme de chacun d’entre nous. Le rythme est soutenu sur l’asphalte sec, d’autant que certains coureurs ont opté pour des baskets typées route, je reste donc sagement aux alentours de la dixième position avant de retrouver un terrain plus propice à mes Sky Race.
La voiture ouvreuse s’arrête au point culminant de cette première côte et deux bénévoles nous font bifurquer sur un petit sentier à gauche. La neige y est très épaisse et nous nous enfonçons jusqu’à la hauteur du genoux, rendant difficile notre progression ; je bénie alors mes guêtres Lafuma qui me maintiennent correctement les pieds au sec. Ce chemin nous amène jusqu’au niveau de l’arche de départ pour être à nouveau applaudis par des «esquimaux» avant de nous éloigner peu à peu vers le premier sous-bois.
Le tempo me convient, le froid me laisse le sentiment de geler ma trachée à chacune de mes bouffées, mais je n’ai pas froid. Le sol est verglacé, plus de poudreuse à l’horizon et les appuis sont fuyants, il nous faut être prudent.
Au premier ravitaillement je suis pointé en sixième position après une heure de course, j’aperçois au loin des frontales qui ne semblent pas s’éloigner et je décide de les rattraper. Nous sommes à présents trois, un peu de compagnie fait plaisir et nous nous rapprochons de Soucieux en Jarest.
Je prends la tête de ce petit groupe, ma montre affiche environ deux heures du matin, je suis dans mes temps de passage. La route reflète par endroit tel un vrai miroir, l’accroche est sommaire mais j’arrive à maintenir une cadence qui me permet de lâcher tour à tour mes compagnons. Je me retrouve quatrième et seul pour me lancer dans une descente relativement technique sur les marches du château. Au bas de ce passage, où la concentration est de mise, je ne remarque pas une bifurcation à gauche et je m’engage sur un mauvais sentier. Quelques minutes d’hésitations avant de distinguer au détour du chemin une frontale remontant à contre sens ; il s’agit d’Oswald……..troisième de la course qui me dit s’être égaré également. Nous remontons les quelques mètres qui nous séparent de l’itinéraire à emprunter et nous nous remettons à courir ensemble jusqu’à Beaunant, l’ultime ravitaillement.
Les bénévoles nous encouragent et nous informent que nous sommes les deux premiers coureurs en 2 heures 40, je réalise alors que deux autres concurrents doivent être en train d’errer dans la nature, et j’apprendrai plus tard qu’ils se sont trompés au même endroit que nous. Je prends le temps de me restaurer avant d’entamer les dix derniers kilomètres tandis qu’Oswald poursuit son effort.
La partie finale est plutôt roulante, nous traversons des lotissements au profil descendant jusqu’au bord des quais de Saône puis du Rhône ; cette fin de parcours est usante et paraît interminable. J’aperçois à distance le faisceau de la frontale de mon prédécesseur sans réussir toutefois à m’en rapprocher.
L’arrivée au stade Gerland est magique, d’autant que sur les cinquante derniers mètres des fumigènes incandescents sur le bas côté apportent une touche mystique au lieu. J’entends le speaker annoncer mon nom avant mon entrée dans le bâtiment, je profite de l’instant présent et je salue Oswald comme il se doit, tandis que l’organisateur m’interroge sur mes impressions d’après course : je suis heureux !
Je termine 2ème de cette première édition qui marquera les mémoires, en 2 heures et 37 minutes pour 45 kilomètres. Mon frère Jérôme quant à lui fait une finit en 4 heures et 30 minutes.
Merci à tous et à bientôt…


TRAIL : EXTREME SPORT
BY SEBASTIEN FARANO